Interview d’Émilie Pelletier et de Didier Dubois, experts RH

« Nous entrons dans l’ère de la prédiction et les postes d’analystes RH explosent »
Didier Dubois (CRHA), possède plus de vingt ans d’expérience en gestion des ressources humaines. Il a fondé et dirige HRM Groupe. Emilie Pelletier (CRHA), spécialisée en communication et marketing, a fondé et dirige Groupe Marketing RH.
Lors du Congrès, ils co-animeront l’atelier « Le Big Data est-il l’avenir du recrutement ? ».
Propos recueillis par Christel Lambolez.
Selon vous, comment vont évoluer les compétences des experts RH dans les prochaines années ?
D.D : La transformation du monde du monde du travail induit un changement des rôles des professionnels au sein des équipes de la fonction RH.
E.P : Il est demandé aux experts RH de développer de nouvelles compétences, notamment afin de maîtriser les outils 2.0, de sourcing, d’analyse des données et des indicateurs internes.
D.D : Les postes d’analystes RH ont toujours existé au Québec mais ce métier explose à l’heure actuelle car nous entrons dans l’ère des données et de la prédiction. Les directions ont de nos jours les mêmes exigences pour la fonction RH que pour les directions financière et marketing. Elles leur demandent des analyses chiffrées.
E.P : Le rôle des DRH est par conséquent de plus en plus stratégique et fondamental.
Les départements RH sont-ils suffisamment organisés pour gérer le Big Data ou données massives de l’entreprise ?
D.D : La digitalisation va permettre d’amoindrir les tâches à faible valeur ajoutée comme la production des paies. Les données quantitatives vont permettre de se concentrer sur les tâches d’analyse stratégique et d’aide à la prise de décision.
E. P : Il est vrai qu’il manque encore les infrastructures technologiques et les compétences appropriées pour bien exploiter l’ensemble des données. Cependant la volonté des organisations et des départements RH est réelle. Le principal enjeu est pour les professionnels RH de développer une double compétence technique et RH afin de posséder des qualités d’analyse et un vocabulaire RH. Ce n’est qu’à cette condition qu’ils pourront rapprocher les données de la réalité et bien interpréter le vécu de l’entreprise.
D.D : Par ailleurs, il arrive souvent que plusieurs systèmes d’information cohabitent au sein d’une même organisation et le manque d’intégration globale de l’ensemble des données ne facilite pas un traitement optimum.
E.P : Or, l’enjeu aujourd’hui est d’être en capacité de collecter des données de qualité pour générer des analyses pertinents. La valeur ajoutée du département RH est dans sa capacité à avancer des arguments chiffrés basés sur des données fiables.
D.D : Le Big Data a beaucoup d’avenir en entreprise mais il reste encore de nombreux ajustements à réaliser avant que les départements puissent s’en servir stratégiquement pour améliorer leur performance.
Comment la DRH peut-elle aider l’organisation à mieux comprendre les motivations, les comportements de ses employés grâce à une meilleure analyse des données ?
E.P et D.D : Il existe aujourd'hui de nombreux systèmes, par l'utilisation d'indicateurs de performance, qui permettent de mesurer l'engagement des employés. Certains outils comme ceux de Officevibe ou encore de NikoNiko permettent même de mesurer le niveaux de bonheur de nos employés.
Quelles sont les dérives de l’utilisation du Big Data en matière de gestion des ressources ?
E.P et D.D : Le Big Data est un outil d'aide à la prise de décision. Il ne réfléchit pas à la place de l'expert de gestion des ressources humaines. Il fournit des indicateurs permettant de prendre la meilleure décision. Le danger principal est de prendre tel quel les résultats proposés par le système et de les appliquer sans une part de jugement de la part de l'expert.
